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Alerte au fascisme en Russie !

jeudi 12 avril 2007, par Solidarité Résistance Antifa

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Russie : confusion idéologique et poison nationaliste. Jusqu’à quand ?

Depuis 2004, la Russie connaît un regain de violences et d’agressions racistes et xénophobes visant les communautés africaines, asiatiques et caucasiennes ainsi que les acteurs de la scène punk rock, les militants antifascistes et la communauté homosexuelle. État des lieux.

Pour l’année 2005, un rapport d’Amnesty International évalue à 28 morts et 366 blessés les victimes des attaques racistes. L’association de défense des droits de l’Homme Sova estime quant à elle à une cinquantaine le nombre de meurtres racistes commis entre 2005 et 2006. La situation est telle que les ambassades des pays étrangers recommandent à leurs ressortissants de faire profil bas dans la rue et de ne pas sortir seul. Les auteurs de ces actes sont des skinheads néonazis, membres de diverses organisations, auxquels a pu se joindre la population, comme à Kondopoga, ville de la frontière russo-finlandaise, où en septembre 2006, pendant 5 jours, les habitants, chauffés par des militants nationalistes du DPNI, se sont livrés à un véritable pogrom à l’encontre des Caucasiens, pillant et incendiant leurs commerces, et dévastant leurs stands au marché de fruits et légumes.

Les premières cibles

Un des dangers soulevé par les antifascistes russes est qu’aujourd’hui, les anciens skinheads tant médiatisés ont adopté un look discret pour se fondre dans la masse, fédérer plus facilement les adeptes du nationalisme, et se livrer à leurs exactions. Quelques exemples : en 2004, Nikolai Guirenko, ethnologue expert des questions du racisme, a été abattu à travers la porte de son domicile. En 2005, à Saint-Pétersbourg, ce fut au tour de Timur Kacharava, activiste anarchiste antifasciste, chanteur du groupe punk hardcore Sandinista, d’être victime d’une agression à coups de couteau, à la sortie d’une librairie, après avoir mené une action de Food not Bombs. Timur est mort de cinq coups de couteaux au cou et Zgibov, l’ami qui l’accompagnait, fut grièvement blessé. Tous les deux avaient reçu des menaces de mort. Le 7 avril 2006, ce fut au tour d’un étudiant sénégalais, activiste de l’ONG Unité africaine, Sambar Lampsa, d’être tué d’une balle dans le cou, et le même mois, Alexander Ryuhin, militant antifasciste et musicien dans un groupe punk, fut tué à Moscou d’une série de coups de couteau dans le cou et dans le cœur. Sombre panorama…

Contexte et organisations

Une cinquantaine de nationalités cohabitent sur le territoire de la Fédération, et depuis l’effondrement de l’URSS, l’intolérance ethnique ne cesse d’augmenter, avec une aggravation observée depuis la guerre de Tchétchénie en 1999. Durant la Glasnost (la période Gorbatchev) des années 80, le terrain nationaliste était occupé par Pamiat (« Mémoires »), mouvement nationaliste et antisémite composé d’intellectuels et d’idéologues. Ses membres se regroupaient dans la rue, autour de conversations politiques. Puis le mouvement explosa du fait de la radicalisation antisémite et xénophobe de l’un de ses fondateurs, Dimitri Vassiliev.

Il a donné naissance, au cours des années 90, à deux groupes qui prendront des directions divergentes.

- Tout d’abord, le RNE (Unité Nationale Russe), ouvertement néonazi, dont les membres, plusieurs milliers, s’exhibent en uniformes noirs, rappelant ceux de la SS, et suivent des entraînements paramilitaires. Le RNE a été interdit en 1999 par les autorités russes.

- L’autre groupe issu de Pamiat est le NBP (Parti national bolchevique), créé par Édouard Limonov, un militant rouge-brun, et par l’idéologue Alexandre Douiguine. Il est intéressant de s’arrêter sur ce parti, qui a un écho non négligeable dans l’opinion publique. Le NBP a été créé en 1992, et avant son éclatement en 2006, on estimait le nombre de ses adhérents à 20 000, plus de nombreux sympathisants. Alexandre Douguine, ancien membre de Pamiat, est le véritable fondateur du NBP. Il a donné au parti une orientation ultralibérale, mêlée à une nostalgie du passé communiste. Il revendique la constitution d’un bloc continental d’esprit socialiste, orthodoxe et musulman, englobant la Russie et l’Europe. Il a quitté le NBP en 1998 pour créer sa propre organisation, Eurasia, un mouvement politique panrusse qui s’appuie sur les religions traditionnelles et bénéficie du soutien d’une partie de l’élite et de l’Église orthodoxe. Quant à Limonov, il a participé aux mouvements dissidents des dernières années du régime communiste, puis s’est exilé aux États-Unis et en France, où il a conservé des amitiés chez les pires fachos. Ancien volontaire de la guerre de Serbie, antisémite et xénophobe, il passe néanmoins son temps à clamer qu’il n’a rien à voir avec les naziskins. En 2006, après un emprisonnement de quatre ans, il a été exclu par l’aile majoritaire du NBP, mais avec ses partisans, il poursuit son action sous le même sigle.

Aujourd’hui, le NBP est l’un des principaux partis s’opposant au régime de Poutine, son implication dans le combat écologique et son discours anticapitaliste apportent beaucoup de confusion à la situation politique russe. Le parti est très populaire au sein de la jeunesse, notamment pour les actions d’éclat menées contre les bâtiments officiels. Les jeunes militants du NBP, entraînés aux arts martiaux et à l’alpinisme, revendiquent l’action directe, comme le plastiquage de forages dans le cadre d’actions pour la défense de l’écologie. C’est également le NBP qui a organisé une grande part du contre-sommet du G8, en Russie, en 2006 !

Dernièrement, le parti nationaliste rouge-brun a effectué un revirement idéologique en critiquant la guerre en Tchétchénie et en organisant une campagne contre la conscription, ce qui rend son positionnement encore plus flou. Certaines organisations humanitaires lui ont même apporté un soutien (critique) face à la répression dont il fait l’objet de la part des autorités russes. Pourtant le programme politique du NBP ne fait aucun doute : abolition des droits de l’Homme au bénéfice des droits de la Nation, création d’une grande Russie s’étalant de Gibraltar à Vladivostok, animée par un « ordre d’acier, un climat de discipline et une soumission totale au nouveau pouvoir ».

Plus à droite encore, on distingue des mouvements comme les SS, « Slaviansky Soyous » (Union slave), mouvement skinhead néonazi, fondé par Dimitri Demychkine, ancien du RNE, dont la spécialité est l’entraînement paramilitaire et les bastonnades des étrangers et des homosexuels. Mais aussi le DPNI (Mouvement contre l’immigration illégale), plus important, créé en 2002 par Alexandre Belov, ancien de Pamiat. L’orientation principale de ce mouvement est la lutte contre l’immigration clandestine et la lutte contre la drogue, ce qui, pour le DPNI, signifie la même chose. Tout comme le NBP, ils veulent se distinguer des skinheads néonazis, mais tout de même « nettoyer la Russie »…

Quel soutien ?

Au milieu de ce climat raciste et nationaliste intolérable, l’opposition antifasciste radicale (essentiellement les scènes punk/rash) est d’autant plus isolée qu’elle subit de plein fouet la répression des autorités russes. Poutine a fondé son propre mouvement de jeunesse antifasciste (sic !), « Nashi », pour ne laisser aucune place aux autres oppositions et pour se donner une consistance démocratique auprès de ses partenaires du G8. Malgré les attaques et les menaces de mort (encore deux agressions graves, 20 coups de couteau sur des punks, en janvier 2007), les antifascistes russes expriment le besoin d’acquérir encore plus d’expérience en termes d’organisation de la lutte, de techniques de combat et de propagande politique. Ils souhaitent rencontrer d’autres acteurs internationaux de la lutte antifasciste. Le SRA envisage une tournée européenne de solidarité avec des groupes punk russes à l’automne 2007. Pour ceux qui souhaiteraient en savoir plus et relayer l’info, voire organiser un débat-concert, écrire à Barricata, qui transmettra.

Source : Barricata


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